mercredi 29 mai 2013

Bill Fay, le talent peut (aussi) attendre

  • Bill Fay Life is people

Songwriter anglais sorti de l'oubli grâce aux bons soins du label Dead oceans et du jeune producteur Joshua Henry, Bill Fay goûte enfin à la reconnaissance que son talent mérite.
Début des années 70, Fay sort deux albums qui passent presque inaperçus au milieu de la production folk britannique de l'époque. Il faut attendre 1998 et une réédition pour que le public et la critique découvrent, ébahis, le talent brut de l'artiste. Pas de légendes sulfureuses, de drogues, de caprices et de fans hytériques, juste un énorme et inhabituel trou biographique, loin de la reconnaissance et de l'industrie du disque. Un peu secoué par ce soudain regain d'attention, Fay ne change rien à son mode de vie : il ne cesse pas d'écrire des chansons et vit de petits boulots.

Il faut attendre 2012 pour que l'artiste retourne en studio, entouré d'une équipe bien plus jeune que lui mais complètement acquise à sa cause. Certain signes ne trompent pas : Nick Cave ou encore Jeff Tweedy des Wilco (qui participe à l'album) lui vouent un véritable culte. Le résultat, c'est un album de folk délicat et intemporel, à faire pâlir un Leonard Cohen au meilleur de sa forme, pas très loin non plus des glorieux congénères que sont Lennon ou Dylan.

L'histoire est belle et le disque l'est tout autant, véritable leçon d'humilité et de patience. Fay accompagne lui-même certaines de ses ballades au piano, s'autorise quelques arrangements avec violon et guitare mais le tout sans jamais briser la douceur inhérente à son style et à sa voix. La production n'a pas été bâclée, elle se fait discrète pour laisser toute la place au chanteur, presque timide, qu'on imagine engoncé sur le tabouret du piano comme il figure sobrement sur la pochette de l'album. Ce disque est manifestement la production de passionnés et la rencontre de ces jeunes fans et de leur idole a quelque chose de très émouvant. Tout en finesse et en beauté fragile, on songe aussi au très sympathique et talentueux Daniel Johnston. Leur poésie est similaire, simple, directe et touchante à l'extrême. De 1971 à 2012, Fay a prouvé que le talent ne se perdait pas toujours avec le temps.

Attention, Never ending happening est la plus belle ballade folk jamais écrite, chantée et écoutée, vous êtes prévenus :



Chroniqué à la Bande Son !

samedi 25 mai 2013

Diabaté, Antunes et Scandurra, un pont sur l'Atlantique

  • Toumani Diabaté ; Arnaldo Antunes ; Edgard Scandurra A Curva da cintura

On a trouvé un sens à l'affreuse expression "world music" et c'est l'album A curva da cintura (la courbe de la ceinture) qui réussit cet exploit. Au départ de cette aventure, la rencontre en 2010 lors d'un festival à Rio de Toumani Diabaté, joueur virtuose de kora et de deux artistes brésiliens, Arnaldo Antunes, chanteur et poète et Edgard Scandurra, guitariste électrique, tous 2 représentants de la scène rock brésilienne, entre avant-garde et MPB (música popular brasileira). Les 2 Brésiliens avaient déjà bien avancé l'élaboration d'un album en duo quand Diabaté les invite au Mali. Charmés par la sensibilité artistique du joueur de kora, les 2 hommes acceptent, mieux, il lui confie la codirection artistique de leur album.

A Curva da cintura a été enregistré au Mali et profite non seulement de la touche de Toumani Diabaté mais aussi, nous ne dirons pas surtout pour ne froisser personne, du rejeton Diabaté, Sidiki, qui avec sa kora augmentée d'une pédale wah-wah assure les morceaux plus relevés du disque. Le son électrique de la kora wah-wah crée un dialogue avec le jeu extraordinaire de Scandurra qui ne boude pas son plaisir. Les autres musiciens, tous très bons, viennent du Symmetric Orchestra de Toumani Diabaté et donnent au disque sa touche africaine.

Les 15 pistes sentent bon le métissage et la joie de jouer tous ensemble. Chaque participant semble au service des autres, la voix suave d'Antunes résonne avec une discrète élégance, le jeu de kora est tout en délicatesse (plutôt normal pour ce type d'instrument) et même le jeu sauvage de Scandurra est retenu. C'est peut-être le seul bémol de cet album, la quasi-perfection dans sa composition et son enregistrement un peu sage. Il ne manque pas de caractère mais peut-être un peu de saveur, le grain de folie en plus, mais l'important est ailleurs. L'échange entre tous ces artistes des 2 continents est une réussite et augure, on l'espère, de semblables et tout aussi excitantes expérimentations.
Un réjouissant pont entre 2 continents.

Cê Não Vai Me Acompanhar



Kaira

Chroniqué à la Bande Son !

mercredi 22 mai 2013

Waldemar Bastos, la fierté de l'Angola

  • Waldemar Bastos, Classics of my soul


Guitariste et chanteur angolais, Waldemar Bastos revient après 7 ans de silence. Peu connu par chez nous, il fait pourtant partie des grandes voix africaines. Sa voix, très émouvante, vibre avec force et chante le drame angolais (ancienne colonie déchirée par des guerres civiles jusqu'en 2002). Le chant, en portugais, entre dans la famille du fado et exprime la fameuse "saudade", mot intraduisible, qu'on peut tout de même tenter de définir comme une mélancolie teintée de nostalgie, notamment chantée avec grâce par la Cap-verdienne Césaria Evora.

Pour cet album, il reprend des standards de la musique angolaise (Mbiri Mbiri ou Tata Ku Matadi) et quelques unes de ses chansons. Exilé en Europe, Bastos s'est attaché les services du London Symphony Orchestra pour l'album. Si on peut regretter la présence parfois envahissante des cordes et des arrangements un peu "tire-larmes", la sensibilité du jeu de guitare et la voix intense de Bastos font vite oublier ces petites imperfections.

Le chanteur traîne derrière lui toutes les misères de son peuple brisé. Il en a compilées quelques unes sur ce disque et en porte les stigmates à même sa voix. L'album n'est pas tout en mélancolie, le bonheur est là aussi, le plaisir simple d'être vivant et Bastos parvient à gorger sa voix de soleil. Et que dire de la superbe langue portugaise parfois si chantante qu'elle semble le pépiement d'un oiseau.

L'album s'achève en beauté avec Velha Xica, sommet d'émotion, plaidoyer pacifiste qui se termine par un cri, véritablement : "indépendance".

Pour un petit aperçu :


A découvrir !

Chroniqué à la Bande Son !

samedi 18 mai 2013

Crocodiles, crasse et classe

  • Crocodiles, Endless flowers

Prétentieux, moches et malpolis. Évidemment qu'on adore Crocodiles !

Troisième album pour le duo de San Diego qui s'est entouré de trois autres musiciens pour les besoins de leur énergique dernier né. Charles Rowell et Brandon Welchez devait assurer la tournée en tête à tête mais les 2 leaders ont annulé au dernier moment : la formule ne leur plaisait plus. On ne peut qu'être sensible à ce haut geste d'auto-sabotage (enfin on a beau jeu, on avait pas acheté nos places nous!). La pourtant cordiale Epicerie moderne n'était pas contente mais alors pas contente du tout ! On ricane, mais c'est quand même une bien mauvaise nouvelle que les oreilles françaises soient privées d'un live qui promettait d'être animal. On se rabattra donc sur notre chaîne hi-fi et l'écoute d'Endless flowers.

Noisy pop, garage, shoegazing, rock psyché, surf music, tout ça mixé et joué avec une innocence primale et sur des guitares saturées de soleil. Crocodiles ne s'embarrasse pas à masquer ses influences, elles sont affichées en grand et ne reste que le plaisir de jouer pour le groupe et d'écouter pour nous. L'album est court, il va droit au but avec 10 titres resserrés et commence d'ailleurs par deux tubes dévastateurs. Ici on ne se cache pas et la musique est un exutoire au trop plein de fougue qui anime ceux qui la font. L'album aurait pu sortir il y a 10 ans ou dans 10 ans, nous on l'aimera toujours : une fleur sans fin !


Endless flowers
Un clip aussi crasseux que la musique qu'il met en scène.



Sunday

Chroniqué à la Bande Son !

mercredi 15 mai 2013

Kitsuné, believe the hype

  • Kitsuné, Parisien vol. 2

Kitsuné c'est un peu le must en matière de hype. Label de musique et ligne de vêtement fondé par un Breton monté sur Paris, Gildas Loaec ; dénicheur de talents tels que Two Door Cinema Club, Klaxons, Hot Chip ou encore Boys Noize ; élément incontournable des nuits parisiennes depuis 10 ans et monument de la French touch.

Pour fêter ses 10 ans, Kitsuné a sorti en février 2012 une compilation d'artistes français, 2ème volume de la série Parisien. Sur cette compil, on retrouve ce qui fait ou qui fera bouger les têtes parisiennes, des morceaux principalement électro, mais pas seulement. On a ainsi découvert avant tout le monde un petit nouveau (qui ne l'était pas tant que ça) et qui allait bientôt faire parler de lui : Lescop.


La Forêt

Kitsuné a du flair et du goût, c'est certain (Kitsuné c'est renard en anglais, si si). L'ensemble de l'album a quelque chose d'excitant et d'implacable : l'assurance de son bon goût peut-être. Vaniteux ? Sûrement, mais irrésistible. Invitations à la danse ou à la transe, les titres se succèdent sans que l'intensité ne retombe. Aucune fausse note sur l'album malgré l'hétérogénéité des groupes qui défilent. Les sonorités électro forment le socle commun. On ressort de la soirée euphorique et comblé : les soirées de l'ambassadeur sont toujours un succès !


Nameless Angelina

Vous avez sûrement déjà entendu le morceau, il tourne en boucle sur les sujets du Petit journal. Hype hype hype hourah !

Chroniqué à la Bande Son !

samedi 11 mai 2013

Tame Impala, nuages multicolores et gros rock

  • Tame Impala, Lonerism 


Le rock psyché se porte très bien, merci. Et Tame Impala n'est pas étranger à cet état de forme. Trio australien guitare, basse, batterie mais pas que (il y a beaucoup de synthé dans leur dernier opus), Tame Impala propose un rock coloré, bizarre et généreux.

En partie enregistré à Paris, ce 2ème album est la synthèse parfaite entre le génie musical des membres du groupe et leur juvénile et bordélique énergie. A aucun moment la maîtrise ne semble le disputer au plaisir de jouer. Ici on sait jouer mais on sait aussi partir dans tous les sens.

Difficile de ne pas parler de psychédélisme à l'écoute de Lonerism tant il semble en être la définition contemporaine. Trip musical, hallucinations sonores, clips qui font mal aux yeux à l'ancienne, tous les ingrédients sont là. Le titre Feels Like We Only Go Backwards reconnaît d'ailleurs volontiers que les influences du groupe ne datent pas d'hier.

Un album qui fait du bien, plein de joyeuses balades sous psychotropes et qui regorge d'inventivité pour encore et toujours réinventer ce bon vieux rock.


Feels like we only go backwards


Elephant

Les guitares lourdes de ce titre ne sont pas sans faire penser aux belles années de Queens of the stone age.

Chroniqué à la Bande Son !

mercredi 8 mai 2013

Kiwanuka, touché par la grace

  • Michael Kiwanuka Home again



Attention les oreilles, voix extraordinaire ! Après Willie Earl Bill et en version plus grand public, la voix soul de 2012. Fils d'Ougandais exilés politiques, Kiwanuka grandit à Londres. Il se met très vite à la guitare, écoute Nirvana et Radiohead. Il se dit très marqué par Ottis Redding (ça s'entend) et Bob Dylan. Il devient naturellement musicien de studio, songe à une carrière solo et rencontre le producteur-musicien Paul Butler. Butler vit et travaille sur la mythique île de Wight où il invite le jeune chanteur. Le courant passe et le résultat, c'est cette perle soul, classe et rétro.

L'album démarre sous les meilleurs hospices avec un morceau d'une enivrante beauté. Les instruments, la production, l'orchestration et surtout la voix de Kiwanuka sur Tell me a tale sont ceux d'un grand classique soul. Rétro et un brin mélancolique, c'est la meilleure introduction possible à l'album. La suite s'enchaîne avec bonheur, on n'est pas face à la production la plus originale du moment, mais l'album possède une vraie couleur et un ton, une patte particulière. On sent que l'artiste à trouver son truc, à rencontrer ses musiciens, bref, quelque chose se passe et quelque chose passe dans nos oreilles.
Un premier album comme un coup d'éclat, on risque d'entendre parler de Kiwanuka dans les années à venir.


Tell me a tale



I'll get along

Chroniqué à la Bande Son !

samedi 4 mai 2013

Du nouveau dans l'Espace Multimedia

A partir du 4 Avril, Micro-Hebdo et L' Ordinateur individuel fusionnent pour donner naissance à  01 Net, le magazine de la High -Tech plaisir.

Cette nouvelle formule (version imprimée, disponible en kiosque tous les 15 jours), porte le même nom que son site internet 01 Net


Vous y trouverez des tests, des essais comparatifs, des conseils pratiques, des enquêtes inédites et plein de surprises dans plus de 100 pages !

Au sommaire du N° 772 (du 18 Avril au 2 Mai)
  • Actualité : Les lunettes Google arrivent et elles vont décoiffer
  • Dossier : Le grand guide du low cost
  • Enquêtes : Les jeux video rendent-ils bête ou intelligent ?
  • Tests et comparatifs : Galaxy S4, le smartphone qui va démoder l' iPhone
  • Services : La commande vocale, enfin ça marche (ou presque...)

A découvrir dans l'Espace Multimedia / Côté COUR
Toujours disponibles (en prêt et/ou en consultation sur place): les derniers numéros de l'Ordinateur Individuel et Micro Hebdo

mercredi 1 mai 2013

Liars, chasseurs d'étrange

  • Liars WIXIW

10 ans d'existence pour ce qu'il convient d'appeler un groupe mythique de la scène indé américaine. Il s'agit de leur 6ème album studio, plus électronique que leurs précédents. Liars propose un rock sombre aux sonorités multiples et complexes. La débauche d'énergie reste punk mais la maîtrise est saisissante.

A l'image du palindrome qui orne leur pochette (prononcer "Wish you"), l'album est parcouru d'une atmosphère intrigante et mystérieuse.
Pour cet album, les musiciens sont partis de sons qu'ils ont d'abord créés, sons majoritairement abstraits à partir desquels ils ont construit leurs 11 titres.

L'ensemble est sombre et envoutant, plus introspectif qu'une séance de 3 heures chez le psy. Angus Andrew, le chanteur, envisage cet album et la recherche continue de nouvelles sonorités qui anime son groupe comme l'expression d'une insatisfaction perpétuelle, le désir et l'absence de désir simultanée. La soif de changement et l'insatisfaction qui en découle, voilà pour les thèmes affichés. Et ouais, tout ça ! Ca peut sembler vaseux, mais à l'écoute de ce drôle d'objet musical, on voit ce qu'ils veulent dire. Et tant pis si y en a des qui veulent nous en dégoûter comme quoi "on dirait un peu Radiohead, y z'ont rien inventé !" Ca suffira pas à nous gâcher ce grand plaisir estampillé 2012.


 
No.1 Against The Rush



Brats

Clip dingue et sauvage dont on ne sort pas en un seul morceau, hommage pour le moins étonnant à Bugs Bunny et Elmer le chasseur.

Chroniqué à la Bande Son !